Somnambule en plein midi
même la viande sur la fourchette
même la fourchette à la main
toujours très près des camarades
mais si loin tout de même si loin
et donner la pâtée au chien
mais je voyais la pâtée s’enfuir
le chien courir le long du mur
et j’entendais ses soupirs
et le chien voyait ma lumière
mon astre
et laissait la pâtée courir
j’avais cette lumière là sur moi
comme ça
mais ce n’était pas
ma lumière
elle était là comme ça
j’aurais voulu
j’ai tout essayé
j’aurais voulu m’en débarrasser... partager
mais elle brûlait tout le monde
personne n’en voulait
mais
si je la mettais en veilleuse
tout le monde applaudissait
lumière couleur de lanterne sourde
petite lampe sans danger
elle plaisait
mais la grande lueur de l’indifférence avouée
le vrai lampadaire
le bec de gaz saignant
contre lequel l’amour saignant se cogne
se blesse
se tue
sans vraiment mourir
la comète
le grand rat de cave que chacun porte dans sa poitrine
l’inquiétante et magnifique lueur
cette braise
personne presque personne n’en veut...
petits mensonges lumineux couleur de vérité lumineuse
vérités verroteries
lumière béate de l’homme franc qui vous regarde
bien en face salamandre installée dans le front du penseur bois et charbons petits briquets’ de l’amitié feux de paille feux de poutres feux de joie
de
Bengale et de tout bois allumettes brindilles boulets bernots comme vous plaisez ! ne croyez pas que je pousse le cri du ver luisant
qui s’excuse de briller ou la plainte déchirante du cul-de-jatte qui voudrait patiner
non...
je hurle à la lumière avec de l’encre et du papier
le soir tard
et je crie
tout de même
il y a la lumière
chacun a sa lumière
et le monde crève de froid
le monde a peur de se brûler les doigts
évidemment
c’est la lumière qui brille qui brûle qui fait cuire
et qui glace le sang
c’est la grande omelette surprise
le soleil avec des caillots de sang
lueur du cœur
lueur de l’amour
lueur
oh il faut la poursuivre cette lueur aveuglante
elle existe
elle crève les yeux
mais s’il faut que les yeux crèvent pour tout voir
crevez les yeux
c’est la lumière vivante que chacun porte en soi et que tout le monde étouffe pour faire comme tout
le monde lumière défendue tu grilles ceux qui t’approchent ceux qui veulent te prendre mais tu les aimes lumière vivante la vie c’est toi
la vie vivante qui marche en avant en revenant sur ses pas
qui marche tout droit qui fait des détours et qui
n’en fait pas soleil de nuit lune de jour étoiles de l’après-midi battements de cœur avant l’amour pendant l’amour après l’amour
grande lumière dans l’œil du porc qui fait l’amour lumière telle que sans abat-jour lumière brute lumière rouge lumière crépusculaire indifférente avide passionnée lumière du printemps si douce lumière d’enfant
toujours la même lumière cruelle et lucide mais parfois si belle visages qui vous approchez yeux fermés bouches ouvertes tout tourne et tout flambe vos deux têtes tête de garçon tête de fille
vos deux têtes tournent et oublient... c’est un astre un instant une victoire une prise
éclair obscur du mauvais temps feux follets de la morale croix de feu pétards mouillés ciboires bien astiqués malheureux petits soleils de cuivre hostensoirs
comme ils sont ridicules et blêmes vos rayons
lorsque la lumière de celle qui aime l’amour
rencontre la lumière de celui qui aime l’amour
drôle d’incendie
peu importe sa durée
toujours hier demain bonjour bonsoir autrefois
jamais toujours et vous-même qu’est-ce que ça fout pourvu que ça flambe.