Quel est ce lied qui fait son nid dans mon silence
Et qu’une femme au loin, délicate, apprivoise ?
Ah ! quel lied monotone a crispé mes mains moites
Au long des draps léchés de fla mm e agonisante ?
Nulle ne berce mon chagrin et ne me parle.
Ailleurs, je le sais bien, au fond de claires chambres.
Les mères ont des voix apaisantes qui chantent
Pour endormir les enfants tristes dans leurs larmes.
Ô cris des nouveau-nés vers les larges mamelles !
Quand sentirai-je ainsi rouler en lourdes vagues
Les seins, dorés comme l’automne et les rivages,
De la féconde épouse aux lèvres maternelles ?
Lied calme, écho lointain d’anciennes musiques,
Chapelet que les doigts d’amoureuses égrènent,
Buire d’où s’évapore un philtre léthargique,
Cil du page oublié dans le lit de la reine ;
Recèles-tu le sens secret de ma jeunesse
Qui se fane à vouloir des voluptés phtisiques.
Et qui se pleure et qui déchire par faiblesse
Sa chair païenne avec la haire catholique ?...
L’humble et doux grillon chante aigûment dans la cendre ;
Son cri plaintif contient l’immense été : les routes
Et la plaine où les blés pacifiques déroulent
Leurs flots lourds jusqu’aux monts où les soleils descendent.
Un voile de sommeil m’enveloppe et m’apaise ;
A fleur d’ombre je sens trembler des lueurs d’aube ;
Je devine à travers mes yeux clos une chose
Qui palpite et qui meurt ; et n’est-ce pas ma peine ?