Marceline Desbordes-Valmore

L’oraison

Je reviens à vos pieds, Marie,
Me sauver du malheur d’aimer :
L’oraison qui m’avait guérie
Ne vaut plus rien pour me calmer.
 
J’avais oublié de la dire
Le soir qu’Olivier me parla :
Triste, il parle comme on soupire,
Et cette plainte me troubla.
 
J’en grondai mon âme étonnée :
Vierge des pleurs, vous savez bien
Que je fus trop infortunée
Pour renouer un doux lien !
 
Et quand cette voix douloureuse
Murmure et se plaint de son sort,
Il faut que je sois bien peureuse
Pour n’oser dire : Parle encor !
 
Je viens donc essayer d’apprendre
Un secret, vous en avez tant !
Pour qu’il ne puisse me surprendre,
Et qu’il devienne heureux pourtant !
 
Mais si je dois être guérie,
Sans qu’il y trouve le bonheur,
Il n’est pas d’oraison, Marie,
Que je puisse apprendre par cœur !

Romances (1830)

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