François-Marie Robert-Dutertre

Le vin.

Jeunes et vieux, si vous êtes moroses
J’ai le secret de rendre la gaité ;
Si vous voulez voir refleurir les roses
De votre teint, signe de la santé,
Mieux qu’un docteur aux savantes formules
Qui vous prescrit tisanes et pilules,
Par la vertu de ma rouge liqueur
Je rends la vie et réchauffe le cœur.
 
Depuis juillet jusqu’au mois de septembre
Le dieu du jour qui féconda ma fleur
Versa sur moi la pourpre, l’or et l’ambre
Pour me vêtir d’une riche couleur.
Le vendangeur m’arracha de la treille,
Et maintenant, captif en la bouteille,
Je suis tout prêt à couler sous vos doigts.
Et moi l’esclave ici vous ferai rois.
 
Au blond Phœbus j’ai dérobé sa flamme
Lorsqu’il dorait les pampres des coteaux ;
D’attraits nouveaux j’embellis toute femme
Sous l’humble toit comme aux riches châteaux.
Fut-elle, hélas ! à l’âge ou l’on est laide,
Magicien je viens vite à son aide,
Et merveilleux prestidigitateur
Je la fais voir sous un prisme enchanteur.
 
Improvisant ma tribune aux harangues,
Sur toute table où brille mon reflet,
En liberté j’ai bientôt mis les langues
Et couronné les fronts d’un feu follet.
Puis l’esprit part comme un feu d’artifice,
Et jamais tant, sous le morne édifice
Où l’Institut du goût dicte les lois,
On n’entendit si fins propos gaulois.

Les loisirs lyriques (1866)

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