Charles Guérin

L’ambre, le seigle mûr, le miel...

L’ambre, le seigle mûr, le miel plein de lumière
Dont le gâteau ressemble aux grottes de Fingal,
Comparés aux cheveux dont mon amie est fière
             N’offrent pas un éclat égal.
 
Que mon amie heureuse auprès de moi s’endorme,
Je ne puis me lasser de voir dans son sommeil
Ses cheveux répandus faire à sa blanche forme
             Un large berceau de soleil.
 
Quand, au creux de son bras plié devant sa joue,
Elle a patiemment peigné leur écheveau,
Elle renverse un peu la tête et les secoue
             Comme des torches sur sa peau.
 
Son buste nu frissonne en sentant leur caresse :
Elle est à son miroir, debout ; ils sont si longs
Que leur dernière boucle expire avec mollesse
             Sur les roses de ses talons.

L’homme intérieur (1901-1905)

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