Alain Cabello Mosnier

Odes, par le Vampire Hybrizein

Vampire Hybrizein* pour vous servir, à moins bien-sûr que ce ne soit moi qui me serve de vous...
ou, clin d’œil à Les Métamorphoses du vampire par Charles Baudelaire (1857) dans lequel la créature est une femme hétéro-fréquencée alors que là l'échange est vicieux, perfide et naturellement homosexuel.
* Hybrizein vient du grec ancien"commettre un outrage contre quelqu’un" ce qui est vous l’avouerez bien trouvé pour un vampire servant à former Hybristophilie désignant les personnes qui aiment baiser avec des criminels.

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Du sommet de ma tour au fond d’une échauguette
je cache les atours de ma nature inquiète
et l’infâme améthyste intaillée de lys noirs
venant d’un arabiste épris de mes savoirs

Détournant les acquits, la mort et la souffrance
voici ce qu’il offrit pour ma concupiscence
L’éternité cruelle et ses mornes arrècs
lit d’ossements rebelle, encan de crânes secs

Il fut le tout premier dont j’abrégeais le siècle
son sang avait giclé comme nuée de thècles
Immortel et salace, eux tombaient à genoux
mais rien ne me tracasse, amour, vice ou tabou

Je quitte mon cercueil, me glisse dans leur couche,
il n’est de pire deuil quand un homme les touchent
Mon parfum est suave, enchanteur, délicat
lui devient une épave et moi son scélérat

Le nez dans ses sueurs, j’écoute ses suppliques
ses plaintes et ses pleurs, tout y est magnifique
Mais que l’on en finisse, Être antédiluvien
que mon âme pourrisse et soit livrée aux chiens

Êtes plus beau que tout, un serpent sur la braise
Le corps ardent et doux, j’y suis trop à mon aise
Puis il meurt peu amène ou bien je l’aide un peu
ce qui double ma haine en son regard vitreux

Ainsi pendant des mois, alors qu’il se décharne
suis dans tous mes émois derrière ma lucarne
Créature infernale ou ami d’Astaroth
amateur de cabale et d’onguents d’algeroth

irrésistiblement pourtant je vous attire
et malgré le néant vous choisiriez le pire
c’est pourquoi je vous traque, alors pas de leçon
dans l’aphrodisiaque, éther de vos frissons

Vous savez, nous ne sommes pas très différents au fond, vous vous brisez les cœurs, moi je les manges...

Achevé et lu le dimanche 16 mai 2021 par Alain Cabello-Mosnier
(poète gay & masseur à Paris)
Note de proximité poétique : 18/20
Il s’agit d’unenote subjective que j’octroie à mes textes.

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Explication poétique :
La poésie ne se limite pas à faire rimer des mots qui peuvent aussi d'ailleurs se constituer en prose également apte à utiliser l'art de la métrique et du comptage des syllabes (ou pieds). Lors de ce comptage, il est apprécié que le milieu de chaque ver puisse éventuellement disposer d'une césure, à savoir une division spatiale de celui-ci mais impliquant que le dernier mot de cette séquence n'empiète pas sur la deuxième partie qu'il amorce.
Parfois, les poètes prennent la liberté de faire rimer ce mot de césure afin que le ver en contienne une deuxième en son milieu. Plus rarement ils accordent à cette rime un genre (masculin ou féminin), identique à celui de la fin du ver, ou différent.
Les mots qui se terminent par un E sont considérés comme féminins, les autres, masculins. Vous observerez qu'à chaque césure féminine, le mot ne peut non seulement pas être mis au pluriel, mais celui qui lui succède doit nécessairement commencer par une voyelle. Ceci n'est pas propre à la césure mais à la poésie, lorsque deux voyelles se font face, une syllabe est absorbée. Donc la règle ne tient pas tant au nombre de syllabes réellement présentes dans chacun des mots pris indépendamment au sein d'un vers, mais celui qui reste après ce travail d'absorption.

C'est un poème à secret
Le petit secret que j'y ai glissé et qui ne se voit pas spontanément, c'est que j'ai rendu chacun de mes vers systématiquement sécable à sa césure. Je voulais pouvoir couper et reconstituer chacun de ces vers de 12 syllabes en deux vers de 6 sans perte syllabique. Si en arithmétique six et six font douze et que douze divisés par deux donnent six, ce n'est pas toujours le cas en poésie. En effet, il n'est pas rare qu'en divisant un ver de 12 pieds en deux nous obtenions un ou deux vers de 5 syllabes et en fusionnant deux vers de six, nous en obtenions un de onze, douze bien-sûr mais aussi de treize ou de quatorze une fois assemblés.

J'ai adoré ce format, car plus vous observez de règles, de contraintes, et plus votre poème se forge une personnalité qui se constitue autour de l'interdit. Il n'est ainsi pas rare qu'une formulation, ou une idée que vous adorez, soit impitoyablement rejetée par l'une de ces règles que vous avez choisi de suivre.
Pour la petite histoire, j'ai commencé ce poème lorsque le premier ver m'est venu. Sa diction me faisait rêver et me donnait envie de lui donner une suite.

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Analyse de poème :

Il s'agit là d'un poème à complication (terme d'horlogerie qualifiant une montre à mécanismes complexes) constitué de 32 vers, 64 rimes sur 12 pieds chacun, allant par paire à la fois de vers et de genre.
La césure du milieu se fait à la sixième syllabe qui dispose de son propre mécanisme de renvoi et d'un genre opposé à celui de la fin, puis inversement.
Ainsi, chaque couple de deux vers dispose de quatre rimes uniques qui ne se retrouvent nulles part ailleurs. Cette césure rend chaque ver parfaitement sécable sans perte de syllabes et dans la poésie homosexuelle c'est un procédé que je n'ai encore jamais rencontré et qui a le mérite de rendre le poème extrêmement élégant en bouche, mais très difficile à former tant les contraintes viennent de toutes parts.

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