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Aimé Césaire

Apothéose

A la quête de mes pas
 
dans la chaleur du temple mal circonscrit d’une cicatrice
 
cette distance qui toujours s’accroît
 
la mauvaise herbe de ma lumière
 
tout ce que j’ai pu ronger de mur (diaphragme à chaque
 
point du jour que fait l’holothurie)
 
minute il me tombera des pépites et des nids d’hirondelle il me tombera une vague de crotales et d’escarbilles il me tombera cet étui où je cache ma dent de sagesse
 
ce paquet de feuilles qui m’empêche d’entendre dans le
 
camouflage féroce de ma sueur indivise
 
lorsque l’on gaule des noix dans les champs toujours bleus
 
des terres importées par le déluge
 
dans un semis de cloaques
 
parmi les enfants de chœur de la moraine
 
sous les dagues de nacre dont on marque les fronts et les
 
cornes de l’éther qui chantent jusqu’aux prunelles
 
II en tombera un gâteau de tsé-tsé pour le
Te-Deum
 
une carcasse couchée dans le sable
 
une aigle impériale des menottes un collier de verroterie
 
il en tombera assez pour faire monter le cours de la
Tamise
 
et un cacatoès pour le pape
Il en tombera toujours quelque chose un indicateur de police un sacristain un poteau téléphonique un clou de girofle
 
Allons-y pour l’oraison d’une poussière de calcédoine pour la feuille morte pour la rive buissonnière d’un sang mal dissout pour les faunes réinventées à la
mauvaise chandelle du tigre qui brûle tant bien que mal à partir de l’empreinte
 
Il en tombera un hareng-saur
 
Pourquoi espèce de nom d’un scrupule ne pas faire suer et resuer le temps placide pour qu’il en tombe tous les pots de vin de notre sang sur la terre enfin saoule et la parole bien claire
son tonnerre
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