Louise Colet

Strophes.

N’a-t-on pas épuisé la coupe de la haine !
Est-il encore des noms qui n’aient été flétris ;
Des malheurs respectés par la foule inhumaine,
Et que n’ait pas frappés la verge du mépris ?
 
Est-il un citoyen, dans la France en délire,
Dont la gloire ou l’honneur n’ait pas subi d’affront
Un héros, qui n’ait vu tomber sous la satyre,
Le laurier qui cachait les rides de son front !
 
Non ! l’injure atteint tout : on jette aux gémonies
Les dieux, les rois déchus et les rois couronnés,
Les tribuns, les guerriers, les sublimes génies,
Les vaincus, les vainqueurs l’un par l’autre entraînés.
 
Le pouvoir qui succède au pouvoir qui s’écroule,
Par le peuple en démence est soudain renversé ;
Et les rugissements échappés de la foule
Accusent le présent, et souillent le passé.
 
Telle au pied de l’Etna, quand son sommet s’allume,
Une terre nouvelle apparaît tout-à-coup ;
Mais le feu l’a créée, et le feu la consume,
Et les flots de la lave anéantissent tout.

Fleurs du midi (1836)

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