Pour ceux qui l’aiment
La ville se laisse découvrir
Nue
Pour les autres elle s’habille
elle s’endimanche
elle s’esplanade se monumente s’invalide se basilique
et
instantanément
à la demande
prend la pose plastique
Les artistes sont très contents
le modèle ne s’est pas fait prier
Préconçue
comme une idée
la photo peut se développer
Le cliché est un vrai cliché
Alors apparaît
Paris dans l’ineffable clarté
de la blancheur
Persil
On peut l’emmagasiner
C’est du tout cuit
Mais dans la petite foule des grands reporters
touristiques surgissent encore des vagabonds et des rêveurs
avec leur lanterne sourde
leur orgue de
Barbarie
Ainsi
Karabuda
comme jadis le calife des
Mille et une
Nuits se
promenait dans
Bagdad comme chez lui se promène dans
Paris
Que dire de sa technique
simplement qu’entre sa boîte de
Pandore et lui
c’est une simple question de tact
la machine obéit à l’homme qui obéit à la machine comme l’aveugle obéit à sa canne blanche qui lui
obéit aussi comme le peintre parfois à son pinceau à son crayon à son outil
Et quand la petite machine à raconter la vie
pour son propre compte
raconte cette vie
Karabuda s’en laisse conter par elle
et
comme un ami se laisse guider
par les rêves de son amie
grâce à elle il surprend tous les secrets publics
de la ville éveillée
de la ville endormie
Et le rideau des jours
se lève et se baisse sur cette ville
sur sa vie
sur la vie
Sur la vie caressée éblouie
sifflée et applaudie
par la vie