Frère, ô doux mendiant qui chantes en plein vent,
Aime-toi, comme l’air du ciel aime le vent.
Frère, poussant les boeufs dans les mottes de terre,
Aime-toi, comme aux champs la glèbe aime la terre.
Frère, qui fais le vin du sang des raisins d’or,
Aime-toi, comme un cep aime ses grappes d’or.
Frère, qui fais le pain, croûte dorée et mie,
Aime-toi, comme au four la croûte aime la mie.
Frère, qui fais l’habit, joyeux tisseur de drap,
Aime-toi, comme en lui la laine aime le drap.
Frère, dont le bateau fend l’azur vert des vagues,
Aime-toi, comme en mer les flots aiment les vagues.
Frère, joueur de luth, gai marieur de sons,
Aime-toi, comme on sent la corde aimer les sons.
Mais en Dieu, frère, sache aimer comme toi-même
Ton frère, et quel qu’il soit, qu’il soit comme toi-même.