Charles Guérin

Ah ! ce bruit affreux de la vie

Ah ! ce bruit affreux de la vie !
Et que dormir serait meilleur
Dans la terre où le caillou crie
Sous la bêche du fossoyeur !
 
Le soleil a toute ma haine ;
Je suis rassasié de voir
Sa lumière quotidienne
Se rire de mon désespoir.
 
Ah ! pouvoir donc enfin m’étendre
Dans le seul lit où l’on soit seul,
Et dans l’ombre attentive entendre
Les vers découdre mon linceul !
 
Et, quand en moi l’être qui pense
Sera dissous lui-même, alors,
Au cœur de l’éternel silence
N’être qu’un mort entre les morts !

L’homme intérieur (1901-1905)

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