Auguste Angellier

Une tempête souffle

Une tempête souffle, et sur l’immense plage
S’appesantit un ciel presque noir et cruel,
Où s’obstine le vol grisâtre d’un pétrel,
Qui le rend plus funèbre encore et plus sauvage ;
 
Un tourbillon de sable éperdu se propage
Vers un horizon blême où tout semble irréel ;
Il traîne sur la dune un lamentable appel
Fait du courroux dos vents et de cris de naufrage ;
 
Les joncs verts frissonnants sont pâles dans la brume ;
Sous le morne brouillard qui roule sur la mer,
Bondit, hurle et s’écroule un tumulte d’écume ;
 
Et dans ce vaste deuil qu’étreint ce ciel de fer,
Nous sentons dans nos cœurs l’indicible amertume
De nos baisers d’adieu flagellés par l’hiver.

À l’amie perdue (1896)

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