André Lemoyne

Printemps

           À Adolphe Magu.
 
 
Les amoureux ne vont pas loin :
On perd du temps aux longs voyages.
Les bords de l’Yvette ou du Loing
Pour eux ont de frais paysages.
 
Ils marchent à pas cadencés
Dont le cœur règle l’harmonie,
Et vont l’un à l’autre enlacés
En suivant leur route bénie.
 
Ils savent de petits sentiers
Où les fleurs de mai sont écloses ;
Quand ils passent, les églantiers,
S’effeuillant, font pleuvoir des roses.
 
Ormes, frênes et châtaigniers,
Taillis et grands fûts, tout verdoie,
Berçant les amours printaniers
Des nids où les cœurs sont en joie :
 
Ramiers au fond des bois perdus,
Bouvreuils des aubépines blanches,
Loriots jaunes suspendus
À la fourche des hautes branches.
 
Le trille ému, les sons flûtés,
Croisent les soupirs d’amoureuses :
Tous les arbres sont enchantés
Par les heureux et les heureuses.

Les charmeuses (1864)

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