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Aimé Césaire

Qui Donc, qui Donc

Et si j’avais besoin de moi
 
d’un vrai sommeil blond de
 
même qu’un éveil d’une ville
 
s’évadant dans la jungle ou
 
le sable flairée nocturne flairée
 
d’un dieu hors rite ou de toi
 
d’un temps de mil et d’entreprise
 
et si j’avais besoin d’une île
 
Bornéo
Sumatra
Maldives
Laquedives
 
si j’avais besoin d’un
Timor parfumé de sandal
 
ou de
Moluques
Ternate
Tidor
 
ou de
Célèbes ou de
Ceylan
 
qui dans la vaste nuit magicienne
 
aux dents d’un peigne triomphant
 
peignerait le flux et le reflux
 
et si j’avais besoin de soleil
 
ou de pluie ou de sang
 
cordial d’une minute d’un petit jour inventé
 
d’un continent inavoué
 
d’un puits d’un lézard d’un rêve
 
songe non rabougri
 
la mémoire poumonneuse et le cœur dans la main et si j’avais besoin de vague ou de misaine ou de la poigne phosphorescente d’une cicatrice éternelle
 
qui donc
 
qui donc
 
aux vents d’un peigne triomphant
 
peignerait une fumée de climats inconstants
 
qui donc
 
qui donc
 
O grande fille à trier sauvage condamnée
 
en grain mon ombre
 
des grains d’une clarté
 
et qui savamment entre loup et chien m’avance
 
attentif à bien brouiller les comptes

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