Après que j’eus par le fer par le feu par la cendre visité les lieux les plus célèbres de l’histoire après que j’eus par la cendre le feu la terre et les astres
courtisé de mes ongles de chien sauvage et de ventouse le champ autoritaire des protoplasmes
Je me trouvai comme à l’accoutumée du temps jadis au milieu d’une usine de noeuds de vipère dans un gange de cactus dans une élaboration de pèlerinages d’épines
—et comme à l’accoutumée j’étais salivé de membres et de langues nés mille ans avant la terre– et comme à l’accoutumée je fis ma prière matinale celle
qui me préserve du mauvais œil et que j’adresse à la pluie sous la couleur aztèque de son nom
Pluie qui si gentiment laves l’académique vagin de la terre
d’une injection perverse
Pluie toute puissante qui fais sauter le doigt des roches
sur le billot
Pluie qui gaves une armée de vers comme n’en saurait
nourrir une forêt de mûriers
Pluie stratège génial qui pousses sur la glace de l’air ton
armée de zigzags de berges innombrables qui ne peut pas
ne pas surprendre l’ennui le mieux gardé
Pluie ruche de guêpes beau lait dont nous sommes les
porcelets
Pluie je vois tes cheveux qui sont une explosion continue
d’un feu d’artifice de hura-crépitans
tes cheveux de fausses nouvelles aussitôt démenties
Pluie qui dans tes plus répréhensibles débordements n’as
garde d’oublier que les jeunes filles du
Chiriqui tirent
soudain de leur corsage de nuit une lampe faite de
lucioles émouvantes
Pluie inflexible qui ponds des oeufs dont les larves sont si
fières que rien ne peut les obliger à passer à la poupe du
soleil et de le saluer comme un amiral
Pluie qui es l’éventail de poisson frais derrière lequel se
cachent les races courtoises pour voir passer la victoire
aux pieds sales
Salut à toi pluie reine au fond de l’éternel déesse dont les
mains sont multiples et dont le destin est unique toi
sperme toi cervelle toi fluide
Pluie capable de tout sauf de laver le sang qui coule sur
les doigts des assassins des peuples surpris sous les
hautes futaies de l’innocence