(Pour Jeanne seule.)
I.
Je ne me mets pas en peine
Du clocher ni du beffroi ;
Je ne sais rien de la reine,
Et je ne sais rien du roi ;
J’ignore, je le confesse,
Si le seigneur est hautain,
Si le curé dit la messe
En grec ou bien en latin ;
S’il faut qu’on pleure ou qu’on danse,
Si les nids jasent entr’eux ;
Mais sais-tu ce que je pense ?
C’est que je suis amoureux.
Sais-tu, Jeanne, à quoi je rêve ?
C’est au mouvement d’oiseau
De ton pied blanc qui se lève
Quand tu passes le ruisseau.
Et sais-tu ce qui me gêne ?
C’est qu’à travers l’horizon,
Jeanne, une invisible chaîne
Me tire vers ta maison.
Et sais-tu ce qui m’ennuie ?
C’est l’air charmant et vainqueur,
Jeanne, dont tu fais la pluie
Et le beau temps dans mon coeur.
Et sais-tu ce qui m’occupe,
Jeanne ? c’est que j’aime mieux
La moindre fleur de ta jupe
Que tous les astres des cieux.