Théodore de Banville

L’Étang Mâlo.

Il est un triste lac à l’eau tranquille et noire
Dont jamais le soleil ne vient broder la moire,
Et dont tous les oiseaux évitent les abords.
 
Un chêne vigoureux a grandi sur ses bords,
Et, courbé par le Temps jusqu’aux ondes, étale
Sur la cime des flots sa masse horizontale.
 
Son feuillage muet se tait malgré le vent ;
Le nymphaea, l’iris, le nénufar mouvant,
Le bleu myosotis et la pervenche sombre
Penchent étiolés, ou meurent sous cette ombre.
 
Ainsi, quand sur le coeur, dans sa jeune saison,
Amour ! tu fais tomber ta large frondaison
Et tes rameaux géants dont le fardeau l’accable,
Tout s’étiole et meurt sous ton ombre implacable.

Les Stalactites (1846)

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