Robert Desnos

Mouchoirs au nadir

Comme l’espace entre eus : devenait plus opaque
Le signe des mouchoirs disparut pour jamais
Eus c’était une amante aux carillons de
Pâques
Qui revenait de
Rome et que l’onde animait.
 
Eux c’était un amant qui partait vers la nuit Érigée sur la route au seuil des capitales
Eus c’était la rivière et le miroir qui fuit
La porte du sépulcre et le cœur du crotale
 
Combien d’oiseaux combien d’échos combien de flammes
Se sont unis au fond des lits de cauchemars
Combien de matelots ont-Os brisé leurs rames
En les trempant dans l’eau hantée par les calmars.
 
Combien d’appels perdus à travers les déserts
Avant de se briser aux portes de la ville
Combien de prêtres morts pendus à leurs rosaires
Combien de trahisons dans les guerres civiles.
 
Le signe des mouchoirs qui se perd dans les nuages
Aux ailes des oiseaux fait ressembler le lin
Les filles à minuit contemplent son image
Vol de mouette apparue dans le miroir sans tain.
 
Les avirons ne heurtent plus les flots du port
Les cloches vendredi ne partent plus pour
Rome
Tout s’est tu puisqu’un soir l’au revoir et la mort
Ont échangé le sel et le vin et la pomme
Les astres sont éteints au zénith qui les porte.
 
O
Zénith ô
Nadir ô ciel tous les chemins
Conduisent à l’amour marqué sur chaque porte
Conduisent à la mort marquée dans chaque main.
 
O
Nadir je connais tes parcs et ton palais
Je connais ton parfum tes fleurs tes créatures
Tes sentiers de vertige où passent les mulets
Du ciel les nuages blancs du soir à l’aventure.
 
O
Nadir dans ton lit de torrent et cascades
Le négatif de celle aimée la seule au ciel
Se baigne et des troupeaux lumineux de dorades
Paissent l’azur sous les arceaux de l’arc-en-ciel.
 
Ni vierge ni déesse et posant ses deux pieds
Sur le croissant de lune et l’anneau des planètes
Dans le ronronnement de tes rouages d’acier
Hors du champ tumultueux fouillé par les lunettes.
 
Vieux
Nadir 6 pavé au col pur des amantes
Est-ce dans ta volière au parc des étincelles
Qu’aboutissent les vols de mouchoirs et la menthe
L’herbe d’oubli dans tes gazons resplendit-elle ?
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