Marceline Desbordes-Valmore

À la Seine

   Rive enchantée,
Berceau de mes amours ;
   Onde argentée,
Image des beaux jours ;
Que ton cours est limpide !
Que ta fuite est rapide !
   Ah ! pour mon cœur,
C’est l’adieu du bonheur.
 
   Déjà ma lyre
Gémit dans les roseaux,
   Et mon délire
A fait frémir tes eaux.
La naïade plaintive
Se penche sur la rive
   Pour m’écouter,
Me plaindre, et m’arrêter.
 
   Cette eau si belle
T’abandonne en courant ;
   Moi, plus fidèle,
Je m’éloigne en pleurant.
Demain celui que j’aime
M’appellera lui-même !...
   Vœux superflus !
Je ne l’entendrai plus.
 
   Ah ! dans ta course,
Emporte mes tourments !
   Mais, à ta source,
Retiens tous mes serments !
Si l’objet que j’adore
Vient m’y chercher encore,
   Dis-lui qu’Amour
T’a promis mon retour.

Romances (1830)

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