Louise Labé

Non havria Ulysse

Non havria Ulysse o qualunqu’altro mai
Piu accorto fù, da quel divino aspetto
Pien di gratie, d’honor et di rispetto
Sperato qual i sento affani e guai.
 
Pur, Amour, co i begli ochi tu fatt’hai
Tal piaga dentro al mio innocente petto,
Di cibo et di calor gia tuo ricetto,
Che rimedio non v’è si tu n’el dai.
 
O sorte dura, che mi fa esser quale
Punta d’un Scorpio, e domandar riparo,
Contr’el velen’ dall’istesso animale.
 
Chieggio li sol’ ancida questa noia,
Non estingua el desir à me si caro,
Che mancar non potra ch’i non mi muoia.
 
Traduction :
 
Ulysse lui-même ou tout autre
Plus avisé encore, de ces divines apparences,
Pleines de grâce, d’honneur et de réserves,
N’aurait rien espéré, comme moi, qui n’en retire que malheur et affliction.
 
Mais toi, Amour, par le moyen de ces beaux yeux,
Tu as fait une telle plaie en mon cœur innocent,
Autrefois ton refuge, qui te donnais chaleur et aliment,
Qu’il n’y a de remède possible, si tu ne le donnes toi-même.
 
Oh dur destin, qui me fait être comme
Le dard d’un scorpion, et chercher protection
Contre le venin de ce même animal.
 
Je ne te demande que d’anéantir cette souffrance,
Mais pas d’éteindre mon si cher désir,
Qui ne pourrait disparaître sans que je me meure.
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