Soleil je t’adore comme les sauvages
à plat ventre sur le rivage
Soleil tu vernis tes chromos
tes paniers de fruits, tes animaux
Fais-moi le corps tanné, salé,
fais ma grande douleur s’en aller
Le nègre dont brillent les dents
est noir dehors, rose dedans
Moi je suis noir dedans et rose
dehors, fais la métamorphose
Change-moi d’odeur et de couleur
comme tu as changé Hyacinthe en fleur
Fais braire la cigale en haut du pin,
fais-moi sentir le four à pain
L’arbre à midi rempli de nuit
la répand le soir à côté de lui
Fais-moi un peu m’habituer
à ce que mon pauvre ami Jean soit tué
Loterie, étage tes lots
de vases, de boules, de couteaux
Tu déballes ta pacotille
sur les fauves, sur les Antilles
Chez nous sors ce que tu as de mieux,
pour ne pas abîmer nos yeux
Baraque de la Goulue, manège
en velours, en miroirs, en arpèges
Arrache mon mal, tire fort
charlatan au carrosse d’or
Que j’ai chaud ! C’est qu’il est midi
Je ne sais plus ce que je dis
Je n’ai plus mon ombre autour de moi
soleil ! ménagerie des mois
Soleil, Buffalo Bill, Barnum,
tu grises mieux que l’opium
Tu es un clown, un toréador,
tu as des chaînes de montre en or
Tu es un nègre bleu qui boxe
les équateurs, les équinoxes
Soleil, je supporte tes coups
tes gros coups de poing sur mon cou
C’est encore toi que je préfère
soleil, délicieux enfer