Tu sens profondément et le bon et le beau,
Et la haine et l’amour, la nature et la vie ;
Et si l’art devant toi les reproduit, ravie
Ton âme resplendit comme un soleil nouveau ;—
Mais si, clavier muet, tu n’as, joyeux ou triste,
Pas d’accents pour chanter ta joie ou des douleurs,
Si ton pinceau lassé cherche en vain des couleurs,
Poète, tu n’es pas artiste !
Tu rends divinement ; ta magistrale main
Possède les secrets de la forme et du nombre,
Sait peupler le néant, fait la lumière et l’ombre,
Et de l’art de charmer tu connais le chemin ;—
Mais si, clavier sonore incessamment en fête,
Ta voix n’a plus besoin du cœur pour retentir,
Si ton pinceau sait peindre avant que de sentir,
Artiste, tu n’es pas poète !