Germain Nouveau

Le Livre

De vous le dire je m’empresse...
Oh ! la fâcheuse inversion !
D’ailleurs la seule qui paraisse
Être échappée à ma paresse,
Au cours de cette édition.
 
Je m’empresse de vous le dire,
Allons ! voilà qui va bien mieux !
Je ne suis pas (faut-il l’écrire ?)
Un poète, je suis sans lyre.
Je crois que cela saute aux yeux.
 
Mais, vous m’avez dit, d’aventure,
Un soir : « Je n’aime pas les vers. »
Or, nous revenions en voiture ;
« Quoi ? pas même ceux de Voiture ? »
Je vous regardai de travers.
 
Je trouvai la chose hardie.
Nous traversions le carrefour,
De l’Ancienne Comédie,
« Moi, je les aime, quoiqu’on dise
Presqu’autant que faire l’amour. »
 
La rue était silencieuse,
Pas un soupir d’accordéon,
Et sous vos yeux de scabieuse
Là-bas se dressait, soucieuse,
La façade de l’Odéon.
 
Vous voyez, j’ai bonne mémoire.
Eh ! bien ! ce mot d’après dîner,
Si j’ai composé mon grimoire,
C’est de sa faute, et c’est histoire, Madame, de vous taquiner.
 
Et je vous le jette...à la tête ?
Ah ! fi ! Sur les bras ?...oh ! que non ?
Dans les jambes ?...Ce serait bête.
Ou tu le verrais à la fête,
C’est entre ton fauteuil et ton...
 
Qu’on se le dise au Montparnasse,
Pays des vers estropiés,
Et des madrigaux à la glace :
Si je veux qu’il soit à sa place
Je le glisserais sous vos pieds.
 
Toutefois, du fond de ton siège
Reçois-le comme un compliment
« À la française »...qu’on abrège
Si l’on entend : « Est-ce qu’il neige ? »
Ou si l’on vous dit : « C’est charmant. »

"Valentines (1885)"

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