François Coppée

À Jeanne Lemerre.

(Pour le jour de son mariage)
 
Poète de vingt ans, je t’ai vue au berceau.
Qu’elle est loin, la chanson du Passant à Silvie !
Que de feuillets tournés du livre de ma vie !
De celui de ce jour lirai-je le verso !
 
Mais il n’est pas tari, l’harmonieux ruisseau.
Je fais des vers encor. Ton bonheur m’y convie.
Accepte, en ton avril d’amour, enfant ravie,
Mes fleurs de la Toussaint, mon dernier chant d’oiseau.
 
Que de jours envolés ! Que de saisons enfuies !—
Te voici femme. Au bras d’un époux tu t’appuies.
L’oranger symbolique orne ton jeune front.
 
Et c’est un sentiment très doux qui me pénètre,
En t’offrant, Jeanne, ainsi qu’aux fils qui te naîtront,
Les vœux ardents du vieil ami qui te vit naître.

Sonnets intimes et poèmes inédits (1911)

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