À vous qui savez être belles,
Favorites du dieu d’amour ;
À vous, maîtresses infidèles,
Qu’on cherche et qu’on fuit tour à tour ;
Salut, tendre hommage, heureux jour,
Et surtout voluptés nouvelles !
Écoutez. Chacun à l’envi
Vous craint, vous adore, et vous gronde ;
Pour moi, je vous dis grand merci.
Vous seules de ce triste monde
Avez l’art d’égayer l’ennui ;
Vous seules variez la scène
De nos goûts et de nos erreurs :
Vous piquez au jeu les acteurs ;
Vous agacez les spectateurs
Que la nouveauté vous amène ;
Le tourbillon qui vous entraîne
Vous prête des appas plus doux ;
Le lendemain d’un rendez-vous
L’amant vous reconnaît à peine ;
Tous les yeux sont fixés sur vous,
Et n’aperçoivent que vos charmes ;
Près de vous naissent les alarmes ;
Les plaintes, jamais les dégoûts ;
En passant Caton vous encense ;
Heureux même par vos rigueurs,
Chacun poursuit votre inconstance ;
Et, s’il n’obtient pas des faveurs,
Il obtient toujours l’espérance.