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Aimé Césaire

Afrique

ta tiare solaire à coups de crosse enfoncée jusqu’au cou
ils l’ont transformée en carcan ; ta voyance
ils l’ont crevée aux yeux ; prostitué ta face pudique ;
emmuselé, hurlant qu’elle était gutturale,
ta voix, qui parlait dans le silence des ombres.
Afrique,
ne tremble pas le combat est nouveau,
le flot vif de ton sang élabore sans faillir
constante une saison ; la nuit c’est aujourd’hui au fond
des mares
le formidable dos instable d’un astre mal endormi,
et poursuis et combats– n’eusses-tu pour conjurer
l’espace que l’espace de ton nom irrité de sécheresse.
Boutis boutis
terre trouée de boutis sacquée
tatouée
grand corps massive défigure où le dur groin fouilla
Afrique les jours oubliés qui cheminent toujours
aux coquilles recourbées dans les doutes du regard
jailliront à la face publique parmi d’heureuses ruines,
dans la plaine
l’arbre blanc aux secourables mains ce sera chaque arbre
une tempête d’arbres parmi l’écume non pareille et les
sables,
les choses cachées remonteront la pente des musiques
endormies,
une plaie d’aujourd’hui est caverne d’orient,
un frissonnement qui sort des noirs feux oubliés, c’est,
des flétrissures jailli de la cendre des paroles amères
de cicatrices, tout lisse et nouveau, un visage
de jadis, caché oiseau craché, oiseau frère du soleil.
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