Sonnet.
Vrai Dieu, si quelque part dans un monde écarté
J’eusse grandi tout seul, nourri par une chèvre,
Sans maîtres, bégayant du cœur et de la lèvre,
Par l’esprit et les yeux épelant la clarté,
J’aurais pu dans tes bras jouir en liberté
Des robustes plaisirs dont l’étude me sèvre ;
Religieux debout, et curieux sans fièvre,
Je n’aurais pas perdu la paix et la fierté.
Mais ils sont venus tous s’acharner sur mon âme.
Ils me rendent aveugle au jour qui te proclame
Et n’agitent en moi que des flambeaux obscurs.
Tes chemins sont barrés de tant de sacrés murs,
Qu’à peine, en sapant tout sur mes pas, te verrai-je,
Et que ma piété ressemble au sacrilège !