Sonnet.
Tant que vous marcherez sous le soleil des plaines,
Par les mauvais chemins poussant les lourds canons,
Ô frères, dont les rois ne savent pas les noms,
Et qui ne savez rien de leurs subtiles haines ;
Tant qu’au hasard frappés par les armes lointaines
Ou parmi la mêlée aveugle et sans pardons,
Vous mourrez dans l’horreur de tous les abandons,
Altérés et rêvant aux natales fontaines ;
Nous lutterons aussi, nous qui sommes restés ;
Nous n’achèterons plus de lâches voluptés,
Ô fils des paysans vainement économes !
Mais nous travaillerons, tourmentés du remords
D’avoir payé le sang des autres jeunes hommes,
Et peut-être aurons-nous nos blessés et nos morts.