Ce jour-là
la mort était déjà venue plusieurs fois
me demander
Mais je lui avais fait dire que je n’étais pas là
car j’avais autre chose à faire que de l’écouter
d’autres chats à fouetter
Et tout particulièrement le
Shah de
Perse
que j’avais capturé
avec un superbe morceau de viande verte
—les
Shahs de
Perse en sont très friands—
un jour qu’il s’en allait
avec ses gens
musique en tête
sur la route de
Téhéran
C’était un grand jour de
Fouette...
et il était très content
rien qu’à l’idée qu’on fouette
les pauvres paysans
Et je l’emmenai h dans une grande valise
et le montrais
gratuitement
aux paysans
et puis je le fouettais publiquement
à titre gracieux
et tous les paysans étaient très heureux
Le remettant dans la valise
je continuais un peu partout en
Perse
mon voyage d’agrément
Agrément pour les autres
pour les petits enfants et puis pour leurs parents
car pour moi je n’éprouvais aucun plaisir
en corrigeant le monarque
Simplement la même fatigue
qu’on a en battant les tapis
persans
C’est alors que se présenta
un animal londonien
et parfait gentleman de
Limehouse sur les toits
Il était de passage et se présenta
Je suis le chat à neuf queues
je connais le travail
et peux voue donner un coup de main
Voilà mon tarif
je veux des souris tous les jours
Parfait lui dis-je parfait
Et je veux aussi qu’on me laisse m’arrêter
sur la route à mon gré
s’il passe sur cette route
la chatte qui me plaît
D’accord lui dis-je d’accord
Et qu’on me laisse lui faire l’amour
précisa le chat
Et je veux des oiseaux
pour lui en faire cadeau
D’accord d’accord tout ce que vous voudrez
lui dis-je
J’étais si fatigué
Et tout s’arrangea pour le mieux
L’animal battait le
Shah de
Perse
fort correctement
Et moi je battais le tambour
et les paysans étaient de plus en plus contents
et ils apportaient au chat
des souris et des rats des champs
Et pour moi
c’était comme toujours
des boissons fraîches
et de jolies filles qui m’embrassaient sur la bouche
Enfin c’était merveilleux
et même un jour
des tisserands
nous offrirent au chat et à moi
un véritable tapis volant
Vous irez plus vite nous dirent-ils
pour faire votre tournée
comme ça tout le monde persan
pourra profiter du spectacle
qui est très réconfortant
Mais voilà qu’un jour
le
Shah
nous regarda douloureusement
Est-ce que ça va durer longtemps ce petit jeu-là
Je me rappelle exactement
la tête qu’il faisait et le temps qu’il faisait
ce jour-là en même temps
Un très beau temps
Nous arrivions sur le tapis
à deux ou trois mille mètres au-dessus de
Téhéran
Et le chat dit au
Shah
gentiment en souriant
Allez allez
Vous plaignez pas
Sa
Majesté
si on avait voulu
on aurait pu vous tuer
ou bien vous enfermer
dans un grand bocal transparent
avec des cornichons méchants
Et là vous seriez mort de soif
et la proie de mille et un tourments
Tout de même
dit le
Shah
c’est pas des choses à faire
et puis il poursuivit
Dans les débuts ça m’a surpris ça m’a étonné et je dirai même que ça m’a fait plaisir pour ne rien vous cacher c’était nouveau vous comprenez maia maintenant je commence à en avoir assez
Ça fait très mal vous savez et puis c’est humiliant sans compter que j’ai l’air d’un zèbre maintenant un zèbre sur le trône de
Perse avouez que c’est pour le moins choquant et je pèse mes mots mais je vous avoue là vraiment que je ne suis pas content mais ça alors pas content pas content du tout
Du tout du tout du tout
du tout du tout
du tout
Et qu’est-ce que ça peut faire
dit le chat
puisqu’on est contents
nous
Et nous descendîmes dans la ville
où partout c’était la fête
Et partout la joie de vivre
se promenait nue dans les rues
Et partout des
Persans ivres
nous souhaitaient la bienvenue
Ça va
dit le chat
La vie est belle
le trône est vide
mais les tonneaux sont pleins
Hélas
je ne reconnais plus ma ville
dit le
Souverain
Et qu’est-ce que je vais devenir
Moi
dans tout cela
Tu vas te rendre utile lui répondit le chat
Et pour commencer tu nettoieras mon plat.