Fable III, Livre III.
Tu fais un fort mauvais métier,
Quoiqu’il soit des plus à la mode,
Disait à cet insecte inutile, incommode,
Plat surtout, qui, parfois, nous oblige à veiller,
Le ver industrieux que nourrit le mûrier.
Pour toi, mordre est une habitude,
Et tourmenter est un plaisir ;
J’en conclus, non sans certitude,
Que tu n’es pas né pour vieillir.
On te déteste ; à chaque phrase,
Petits et grands, chacun le dit ;
Si l’on te nomme, on te maudit ;
Si l’on te rencontre, on t’écrase.
M’en croiras-tu ? Renonce à tes goûts malfaisants.
Tu fus nuisible, sois utile.
Comme les dieux, l’homme est facile ;
On l’adoucit par des présents.
Songes-y bien, l’or que je file,
Celui que l’abeille distille,
De tes persécuteurs a fait nos complaisants :
À l’œuvre donc !—Vraiment, c’est parler comme un livre !
Dit la fille des nuits ; et ceux à qui le ciel
Donna l’art de produire ou la soie ou le miel,
N’ont pas d’avis meilleur à suivre ;
Mais nous, à qui Dieu départit
Moins de talent que d’appétit
Si nous ne mordons, comment vivre ?