Ils disent qu’au ciel on retrouve
Ces chers petits morts tant pleurés.
Ah ! savent-ils bien ce qu’éprouve
Le cœur des parents éplorés.
Ils sont étonnés qu’on se plaigne.
Savent-ils bien notre douleur ?
À nous dont le sein meurtri saigne,
On parle d’un monde meilleur !
J’y crois à cette autre demeure,
À cet immense azur béni ;
Oui, j’y crois ! et, pourtant, je pleure :
J’ai peur de ce vague infini.
Lui, là-haut, si loin de sa mère !
Je ne puis croire qu’il n’ait pas
Comme une nostalgie amère
De ceux qu’il aimait ici-bas.
Et, comme en un rêve, il me semble
Voir errer dans ce ciel si grand
Un bel ange qui lui ressemble,
Qui nous tend les bras en pleurant.
Il partit alors que les roses
S’ouvrent dans l’air étincelant :
De leurs premières fleurs écloses
On couvrit le suaire blanc.
Pour longtemps la chambre est fermée :
Dans sa froide atmosphère en deuil
Flotte encore l’âme embaumée
Des chrysanthèmes du cercueil.
En secret, la mère, hagarde,
Toute pâle, tournant la clé
De l’huis funèbre, se hasarde
À franchir le seuil endeuillé.
Dans la pièce où son œil pénètre
Elle cherche et voudrait bien voir
Les beaux yeux du cher petit être
Qui manque aux caresses du soir.
Une fièvre intense hallucine
Et son oreille et son regard ;
Ce nid plein d’ombre la fascine :
Son trésor est là, quelque part.
Ce demi-jour mélancolique
Que reflète le ténébreux
Cristal du grand miroir oblique.
C’est le reflet des jours heureux.
L’alcôve était claire et fleurie ;
C’est là que l’enfant fut bercé.
Ah ! l’alcôve est bien assombrie
Depuis que la mort a passé.
Où sont les fleurs, les fines gazes,
Les merveilles du blanc trousseau ?
Les fleurs ne sont plus dans les vases,
Et l’enfant n’est plus au berceau.
C’est pourquoi la mère affolée,
En proie aux regrets superflus,
Ne veut pas être consolée,
Parce que son amour n’est plus.