Jean de La Fontaine

L’oiseleur, l’autour et l’alouette

Les injustices des pervers
Servent souvent d’excuse aux nôtres.
Telle est la loi de l’Univers :
Si tu veux qu’on t’épargne, épargne aussi les autres.
Un manant au miroir prenait des oisillons.
Le fantôme brillant attire une Alouette :
Aussitôt un Autour, planant sur les sillons,
Descend des airs, fond et se jette
Sur celle qui chantait, quoique près du tombeau.
Elle avait évité la fatale machine,
Lorsque, se rencontrant sous la main de l’oiseau,
Elle sent son ongle maline.
Pendant qu’à la plumer l’Autour est occupé,
Lui-même sous les rets demeure enveloppé ;
« Oiseleur, laisse-moi, dit-il en son langage ;
Je ne t’ai jamais fait de mal. »
L’Oiseleur repartit : « Ce petit animal
T’en avait-il fait davantage ? »

Les fables du livre VI (1678)

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