Henri Durand

Chant de retour.

Monts bien-aimés, rives pour moi sacrées !
Comment chanter lors d’un adieu touchant ?
Lorsque l’oiseau va quitter nos contrées,
Pour le retour il réserve son chant :
Longtemps muet, s’il nous revient fidèle,
C’est saluant de la voix et de l’aile.
Ils sont bien loin les rêves d’autrefois,
Si le retour n’éveille point ma voix !
 
Près des palais où nul amour n’inspire,
Leur préférant nos huttes de bergers,
Comme l’Hébreu, j’avais pendu ma lyre
Aux saules verts des fleuves étrangers.
Brise du lac, vers la rive où j’aborde,
Souffle de mai qui frémit sur ma corde !
Ils sont bien loin les rêves d’autrefois,
Si ce printemps n’éveille pas ma voix.
 
Là-bas, là-bas,... disait l’espoir qui trompe ;
Le monde est grand, le cœur plus grand encore ;
Succès, plaisir, amour, honneur et pompe,
Va, cherche, trouve, au loin fais ton trésor !
Mais bientôt las de ces mœurs buissonnières
Le cœur revient à ses amours premières ;
Ils sont bien loin les rêves d’autrefois,
Si le retour n’éveille pas ma voix.
 
Pourtant, qui sait si de tout ce qu’on aime
Rien n’a changé, n’a faussé son chemin !
De l’amitié le cœur seul est le même,
Sa coupe est pleine, elle nous tend la main ;
Outre les fleurs qui parent sa couronne
Elle a ses fruits que nous mûrit l’automne ;
Ah ! qu’ils sont loin les rêves d’autrefois,
Si vous, amis ! n’éveillez point ma voix.

Poésies complètes (1858)

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