Charles-Augustin Sainte-Beuve

Un grand chemin ouvert

                       Sonnet.
 
 
Un grand chemin ouvert, une banale route
À travers vos moissons ; tout le jour, au soleil
Poudreuse ; dont le bruit vous ôte le sommeil ;
Où la rosée en pleurs n’a jamais une goutte ;
 
—Gloire, à travers la vie, ainsi je te redoute.
Oh ! que j’aime bien mieux quelque sentier pareil
À ceux dont parle Horace, où je puis au réveil
Marcher au frais, et d’où, sans être vu, j’écoute !
 
Oh ! que j’aime bien mieux dans mon pré le ruisseau
Qui murmure voilé sous les fleurs du berceau,
Qu’un fleuve résonnant dans un grand paysage !
 
Car le fleuve avec lui porte, le long des bords,
Promeneurs, mariniers ; et les tonneaux des ports
Nous dérobent souvent le gazon du rivage.
 
                                             Saint-Maur, août 1829.

Les consolations (1830)

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