Alphonse Beauregard

Le passé.

Telle qu’une vapeur s’épaississant toujours,
La nuit grave s’étend sur les îles boisées ;
Les plus belles au loin, déjà semblent rasées
Et les rives n’ont plus que de fuyants contours.
 
A mes pieds, le vent d’est chassant l’onde à rebours,
Courbe les joncs comme autant d’âmes angoissées.
—Veux-tu que nous allions reposer nos pensées
Dans l’ombre qui sera bientôt comme un velours ?
 
Nous causerons de nos projets, de choses vaines,
De l’avenir, jongleur qu’on dirait les mains pleines,
Mais non pas du passé, c’est terrain défendu.
 
Le passé surgira de la nuit et des houles,
Et parlera si fort, qu’au retour vers les foules,
Nous resterons muets de l’avoir entendu.
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